BDSM



Première Sortie
Souvent je discute avec des personnes qui réalisent leur première sortie en club bdsm. Force est de constater que dans l’immense majorité des cas, c’est un événement qui est vécu avec une très grande intensité émotionnelle. Certains, peut-être la plupart, ont eu précédemment l’expérience de clubs libertins « classiques ». Clubs dont ils reconnaitront qu’il n’aura pas été aisé non plus de franchir le seuil. Mais pour autant, l’expérience du club bdsm reste unique.
Pourquoi donc ?
Peut-être d’abord car les Clubs bdsm sont rares. A Paris, quelques clubs proposent des soirées ou une ambiance sm. mais il n’existe qu’un seul club dédié au bdsm, un lieu mythique qui s’est patiné avec le temps, un lieu coupé de l’époque et du monde : le fameux Cris & Chuchotements , tenu par mon ami Pascal depuis plus de vingt ans. Alors nécessairement, entrer dans le lieu est en soi une expérience. Ce n’est pas comme découvrir un club libertin parmi d’autres dont on pourra critiquer ceci ou critiquer cela comme on le ferait dans d’un restaurant. Chaque grande capitale à son club SM de référence Le lieu impose un respect.

La peur et l’angoisse
Mais il y a sans doute une raison plus profonde; car descendre l’escalier qui mène aux entrailles de Cris & Chuchotements, ce n’est pas rencontrer un lieu, c’est rencontrer le bdsm. Bien sûr, beaucoup auront déjà eu une pratique, soit en couple ou dans des soirées plus ou moins mondaines. Mais entrer pour la première fois dans un lieu mythique c’est rencontrer l’essence même de cette pratique.
On dit que l’angoisse est une peur sans objet. On a peur de quelque chose de précis et on est angoissé par ce que l’on ne connait pas. Cette appréhension qu’on lie sur le regard de certains hommes ou de certaines femmes au moment où ils arrivent pour la première fois au club, je me suis fait une opinion personnelle de quelle elle est. Comme toute opinion, elle est sans doute juste et fausse.
Mon opinion est que le novice est angoissé face au mystère insondable du sadisme. Et son angoisse sera vite rassurée et apaisée car dans un club bdsm digne de ce nom, on trouve beaucoup de choses mais pas de sadisme.
Je m’explique.
Nous avons tous en nous des images culturels évocatrices du sado-masochisme, qui se sont sédimentées sur nos âmes et l’ont façonnée. Des images de flagellations , de fers rouges, de cages moyenâgeuses, de séances de tortures de l’inquisition, de cris effrayants remontant des profondeurs de l’enfer. Ces images nous ont évoqués nos pires craintes, nous les avons redouté par dessus tout et elles ont accompagnées nos cauchemars. Pire encore nous savons tous combien l’être humain sait être réellement cruel avec son prochain. Cette cruauté, nous le savons, n’est pas qu’un fantasme. Les pervers sadiques existent, nous en côtoyons depuis notre enfance. Parfois pour certains d’entre nous la rencontre fut même cruelle laissant des cicatrices sur les corps et-ou les âmes.
C’est cela que l’on craint lorsque l’on pénètre pour la première fois dans un club bdsm. Retrouver cette part sombre de l’être humain, rencontrer celui qui prend un plaisir pervers à voir souffrir. A voir souffrir réellement. Ce sont ces images de bourreaux cruels infligeant des sévices définitifs qui remontent du plus profond de l’âme des primo-visiteurs.
Cette vision a été théorisée. C’est la vision psychanalytique du sado-masochisme qui veut qu’au plaisir de souffrir réponde le plaisir de voir souffrir dans un entremêlement qui crée la relation. Je ne connais pas bien Sigmund Freud et nous avons eu d’autres différents dans d’autres circonstances mais il est fort probable que le brave Sigmund n’ait pas fréquenté les clubs SM de Vienne. En effet, le propre de la relation bdsm et qu’elle ne se construit pas sur une pulsion de mort. Dit plus communément, le bdsm ce n’est pas un bourreau qui rencontre un ou une suppliciée, ce sont deux personnes qui s’offrent l’une à l’autre dans deux rôles différents et bienveillants. Même si cette bienveillance prend le chemin de la discipline, de la douleur, de l’humiliation, ces modalités ne sont pas la destination ; la véritable destination c’est la bienveillance : l’amour. Osons le terme.
L’amour
Voilà pourquoi l’angoisse de la première visite s’estompe vite. Chacun découvre un monde sans bourreau où l’attention à autrui est même plus grande et développé que dans la plupart des clubs libertins. Un monde où chacun participe d’une même volonté d’accomplissement et d’épanouissement. L’inverse d’une pulsion de mort. l’Eros qui repousse le thanatos.
Au cours d’une soirée en club, des hommes et des femmes seront attachés, fouettés, flagellés, giflés, humiliés, abusés. Pour autant, la bienveillance étant là, ce qui en ressort avant tout, c’est une esthétique qui transcende notre appréhension pour le sadisme d’autrui.
Raison pour laquelle la peur de ne pas correspondre au lieu ou l’appréhension de ne pas être à la hauteur se dissipent très vite lors de cette première visite. Il reste cette immersion au sein d’un lieu hors du temps où se produit parfois une incroyable rencontre. La rencontre que l’on fait entre soi-même et celui que l’on a toujours été au plus profond de soi.
 Cris & Chuchotements (Paris)

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